De la même manière qu'il faut distinguer Bushis et Samouraïs, les Sohei et les Yamabushis sont deux types de guerriers totalement différents. Par l'époque d'abord, puisque les Sohei ( moines soldats ) ont surtout été présents à l'époque de Nara et de Heian, alors que la période des Yamabushis été plutôt celle de Momoyama et Edo. Mais c'est surtout le rôle de chacun de ces prêtres guerriers qui fait la principale différence.
Avec l'avènement du bouddhisme, les temples et les sectes encouragées par l'État devinrent de plus en plus riches et puissants. Pour se protéger des brigands et des bandes armées, les temples employèrent des gardes armés: les Sohei. Peu à peu, de la simple défense, les sectes passérent à l'offensive. Les monastères utilisèrent ces redoutables moines soldats pour attaquer d'autres temples concurrents ou bien pour effrayer la cour afin d'obtenir plus d'avantages fiscaux ou immobiliers.
Les Yamabushis étaient, eux, des
ascètes de la secte Tendaï-Shû, qui se reconnaissaient dans les doctrines du Shugendô ( mélange de Bouddhisme et de croyances populaires ). Par différents exercices, ils souhaitaient endurcir à la fois leurs corps et leurs esprits. En utilisant plus ou moins la sorcellerie et la magie, ces prêtres s'entourèrent d'une aura mystico-religieuse qui les rendit très célèbres dans un Japon encore très réceptif à la superstition.
La constitution de grands temples bouddhistes à Nara vers 730 amène le recrutement de gardes armés (Soheis) pour défendre moines et bâtiments. Mais assez rapidement, les religieux vont utiliser cette force contre les temples concurrents, mais également pour faire pression sur la Cour et la noblesse afin d'asseoir leurs droits et leurs revendications. A l'ère Heian, les Soheis sont si nombreux qu'on en compte plus de 3.000 sur le mont Hiei. Leurs razzias sur la capitale sont si terribles que l'Empereur est obligé d'appeler au secours des Bushis de l'Est du Japon.
A l'époque de Kamakura, après la prise du pouvoir par les Bushis, les Soheis voient leur rôles fortement réduit, mais restent toujours une force redoutable. Le plus célèbre d'entre eux, Benkei, est même le compagnon de l'infortuné Minamoto Yoshitune, dont il partage le destin tragique.
L'acte final des Sohei a lieu néanmoins durant la période d'unification du Japon. Après l'effondrement du pouvoir central des Ashikaga vers 1450, les religieux comme de nombreux Daimyos deviennent un pouvoir militaire indépendant. Avec les habitants de leurs domaines, il créent des sectes autonomes armées ( Ikkô Ikki ) . Oda Nobunaga, dans sa politique d'unification du Japon, se heurte naturellement à ces sectes et engagera de longues et coûteuses guerres avant de les détruire totalement. Avec l'extinction de ces Ikkô Ikki, se termine le rôle militaire de la religion dans l'histoire du Japon et également la fin des Soheis.